Commentaires à propos de PISA

Publié le par le-krach-educatif

Mensonges et faux débats au service du conservatisme. 

 

D'innombrables  enseignants et de bons observateurs du système éducatif Français le disent depuis de nombreuses années sur tous les tons : notre école va mal, notre école va très mal, notre système éducatif est au bord d'une catastrophe.

Pourquoi ? Principalement parce qu'il est mal gouverné, ultra centralisé, arc bouté sur des choix politiques désastreux, dont le principal consiste en la formule du Collège Unique dans sa conception actuelle et le mépris pour les formations techniques et professionnelles.

Les responsabilités sont concentrées. Le système éducatif français est de loin le plus autoritaire, le plus dogmatique, le plus centralisé. Il est dirigé par des hiérarques sourds et aveugles dont la doctrine n'a pas varié d'un iota depuis quarante années de dégradation de la situation éducative.

Pour ces gens, une enquête internationale comme celle de PISA, disons-le familièrement : ce n'est pas un cadeau ! Les résultats y apparaissent pour ce qu'ils sont, assez pitoyables, sachant pourtant qu'ils ne reflètent le désastre que de manière fort incomplète, puisque les questions de PISA, posées aux élèves de quinze ans, ne sont pas du niveau de la fin du collège français, mais du niveau du "socle" c'est-à-dire plutôt du niveau cinquième-quatrième.

Voyons à quelles contorsions doit se livrer l'un de ces hiérarques pour commenter les résultats de l'enquête 2009.

Dans un chat du Monde, Eric Charbonnier, "Responsable du classement PISA-France", interprète à sa manière les résultats en 2009 de l'enquête PISA.

Citons :

La France aujourd'hui peut être considérée comme un élève moyen parmi les pays de l'OCDE. Sa performance, qu'elle soit en compréhension de l'écrit, en mathématiques ou en sciences, se situe au niveau de la moyenne des pays de l'OCDE.

Précisons :

La France est classée 18ème en Lecture, la moyenne serait la place 15,

16ème en Mathématiques, la moyenne étant à la place 15,

21ème en Sciences, la moyenne étant à la place 18.

La France est donc, dans chaque cas, classée en dessous de la moyenne. Certes, les écarts ne sont pas très grands, mais on aimerait mieux qu'ils soient dans l'autre sens. Encore faut-il considérer de quelle "moyenne" il s'agit. Derrière la France on trouve des pays dont le niveau de développement ne peut pas tout à fait lui être comparé : le Mexique, le Chili, la Turquie, la Slovaquie, le Portugal, la Grèce. Devant la France sont classés la plupart de ses concurrents directs. Il serait plus pertinent de considérer que la France se classe dans le dernier tiers des pays à développement comparable.

Passons à deux autres points. A la question :

Franck : Le collège unique n'est-il pas une cause de l'échec scolaire des élèves ?

Monsieur Charbonnier répond :

Non, on ne peut pas considérer que le collègue unique est un échec. Les pays où la différenciation scolaire se situe avant le collège sont souvent des pays avec de fortes inégalités sociales.

A la question :

Mélanie : Quelles réformes de son système éducatif l'Allemagne a-t-elle engagées pour connaître une progression aussi importante dans le classement PISA ?

Monsieur Charbonnier répond :

L'Allemagne a vécu en 2000 un véritable "PISA-choc" : sa performance était mauvaise et les inégalités sociales, colossales (…).L'apprentissage de la langue allemande commence maintenant dès l'école maternelle et, dans l'enseignement primaire, des cantines scolaires ont été créées (…).Ces deux réformes ont permis à l'Allemagne de se situer aujourd'hui au même niveau que la France, c'est-à-dire au niveau de la moyenne des pays de l'OCDE.

Commentaire.

Si l'on tente d'interpréter ces réponses à la logique incertaine, le Collège unique produirait de l'égalité sociale et des offres éducatives optionnelles (y compris techniques et préprofessionnelles) plus précoces créeraient de l'inégalité. Cette thèse est un peu surprenante étant donné que pour Monsieur Charbonnier, l'Ecole française est très inégalitaire alors même qu'elle est la championne du Collège Unique...  Comprenne qui pourra. Mais cette formulation maladroite cache un sujet bien délicat. Car en écrivant "Les pays où la différenciation scolaire se situe avant le collège", notre homme songe sans doute à l'Allemagne, objet de la question suivante. Le système éducatif de notre voisin allemand, en effet, est assez largement différent du notre puisque dès l'âge de onze ans, les enfants sont orientés à peu près par tiers vers l'enseignement préprofessionnel court, l'enseignement préprofessionnel long, et enfin l'enseignement général (qui conduit à l'Abitur). Passons sur le raisonnement qui voit des modifications de l'enseignement en maternelle en 2000 produire des effets spectaculaire pour des jeunes de 15 ans en 2009... 

Il a souvent été de bon ton de souligner que l'Allemagne obtenait à PISA de moins bons résultats que la France. Cela a toujours été inexact. L'Allemagne, aux enquêtes précédentes, a obtenu à chaque fois des résultats voisins de ceux de la France. Mais cette fois, elle est nettement classée devant.

Dans ce qui suit, nous rapprochons les résultats qu'obtient notre pays, des résultats de l'Allemagne, mais aussi de ceux des Pays-Bas et de la Finlande. En effet, et ceci est délibérément tû par les hiérarques de l'éducation nationale et les sociologues qui les appuient, les Pays-Bas (très bien classés) ont un système éducatif pratiquement calqué sur celui de l'Allemagne (donc loin du collège unique) et la Finlande, quant à elle (qui est tout en haut de ce classement) n'a pas non plus de Collège unique. Elle a une ECOLE unique, où tous les élèves suivent le même cursus mais cette école se termine à 13 ans (et non à 15 comme chez nous). Ensuite, les cursus sont différentiés par des options. C'est d'ailleurs de notre point de vue le système le plus équilibré. Il suppose que le socle commun soit acquis vers 13 ans et qu'ensuite il y ait une offre d'éducation plus diversifiée selon les goûts et les talents des jeunes.

Voici les classements de ces pays à PISA :

En lecture, la France est classée 18ème, l'Allemagne  16ème, les Pays-Bas sont 7ème, la Finlande 2ème.

En maths, la France est 16ème, l'Allemagne est 10ème, les Pays-Bas sont 6ème, la Finlande 2ème.

En Sciences, la France est 21ème, l'Allemagne est 9ème, les Pays-Bas, 8ème, la Finlande 1ère.

Pour Monsieur Charbonnier, notre pays produit une "élite" remarquable, mais aussi trop d'élèves qui sortent du système sans aucune qualification.

La seconde assertion est correcte. Le pourcentage des élèves que l'éducation nationale "rate" complètement est en train de passer de 15% à 20% ce qui constitue une véritable catastrophe. Par contre, le soi disant expert (son expertise n'est reconnue que dans un rayon de quelques mètres autour du bureau qu'il occupe) se trompe en étant satisfait de "nos meilleurs élèves". Si c'était vrai, pour quelle raison la recherche française serait-elle, comme elle est (les mathématiques constituant une exception) dans une situation plutôt médiocre (cf les enquêtes que nous citons dans notre livre) ? Pour quelle raison nos voisins, comme justement l'Allemagne, auraient-ils une industrie exportatrice bien plus dynamique que la nôtre dans les domaines de la haute technologie ?

Non, nos "élites" ne sont pas assez qualifiées. Notre système éducatif les "rate" également. Les 10% de nos meilleurs élèves ne sont pas mieux situés que l'ensemble, si on les compare aux 10% des autres pays.

Comment Monsieur Charbonnier parvient-il à sa conclusion ? Elémentaire mon cher Watson ! Un bon lecteur de statistiques parvient toujours à prouver ce qu'il veut. Voici l'astuce : si l'on considère, non les 10% meilleurs, mais les 30% meilleurs, alors en effet, la comparaison est peut-être moins cuisante…

Mais les 30% meilleurs, non, ce n'est pas l'élite…

Bref, la considération des débats que suscite la publication des résultats de PISA ne porte guère à l'optimisme. Entre naïvetés, superficialités et arguments de mauvaise foi, on n'avance guère. L'oiseau de Minerve, dit-on, s'envole au crépuscule…il ne s'est pas envolé et la nuit tombe, sur notre école…

 

Georges Kalisthène 

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